Héliopolis

Ville solaire, on y adorait des divinités liées au Soleil sous la forme d’une triade :

le dieu Khépri, représentant le Soleil renaissant ;
le dieu Rê, le Soleil à son zénith ;
le dieu Atoum, le Soleil couchant.
Ces trois divinités finissent par se confondre en une seule représentée par l’astre solaire dont les trois états principaux, l’aube, le zénith et le crépuscule sont symbolisés par ces trois dieux. Le dieu en constante transformation est à l’origine de la création du monde. Il renaît chaque jour pour disparaître chaque soir et continue ainsi son cycle éternel.

Le dieu possédait deux principales hypostases :

le Bénou (ancêtre du Phénix) ;
le dieu taureau Mnévis, hypostase vivante de Rê.
Si le premier reste à nos yeux légendaire, le second était bien réel et possédait son étable sacrée et sa nécropole au cœur même d’Héliopolis. Tous deux possédaient également la capacité de la renaissance à l’instar de l’astre qu’ils incarnaient.

Enfin, c’est ici aussi qu’était vénérée la sainte ennéade, ou assemblée des neuf dieux issus de Rê qui symbolisaient la création du monde :

Rê – le soleil – le feu divin,
Shou – l’air – le souffle divin,
Tefnout – l’humidité – la semence divine,
Geb – la terre,
Nout – la voûte céleste,
Osiris,
Isis
Seth,
Nephtys.
De nombreuses mythologies découlèrent de cette cosmogonie dont celle d’Isis et Osiris, de Seth et Horus, de Sekhmet, l’Œil de Rê, etc.

La ville était également le siège d’un culte d’Hathor, Dame du Sycomore, et c’est à Onou qu’au milieu d’un bois sacré se trouvait le légendaire perséa sacré sur les fruits duquel Thot inscrivait les noms de chaque souverain, héritier du trône d’Horus.

Tous ces dieux devaient posséder leur temple, leur chapelle ou leur oratoire autour du temple principal qui dominait la ville.

À l’Ancien Empire, le culte de Rê entra probablement en concurrence avec celui du dieu Ptah adoré dans la ville voisine de Memphis et dont le culte est attesté dès la période thinite. En effet les premières dynasties royales qui suivaient selon le mythe les ancêtres divins sur le trône d’Horus, choisirent pour nécropole le site de Saqqarah voisin de la cité du dieu Ptah et ce jusqu’à la IIIe dynastie, définissant du même coup l’emplacement de la résidence royale des premiers temps.

Pour autant les temples de la cité du dieu solaire ne sont pas négligés. On y a retrouvé les restes de reliefs datant du règne de Djéser, représentant des divinités de la grande ennéade, ainsi que le roi accompagné de son épouse Hétephernebty et de deux de ses filles dont Inetkaes. Ces reliefs devaient orner l’un des sanctuaires abrités dans l’enceinte primitive de la ville et sont l’un des rares témoignages de l’attention portée par pharaon aux cultes d’Héliopolis pour cette haute époque de l’histoire du pays.

La IVe dynastie marque alors un tournant non seulement dans le choix des nécropoles royales (Gizeh est géographiquement en face d’Héliopolis) mais également dans l’aspect résolument solaire de l’architecture pyramidale. On a découvert récemment tout un quartier de la ville qui s’était édifiée à Gizeh, à partir de Khoufou – le Khéops des grecs – ainsi qu’un ensemble palatial attestant d’un mouvement de la cour plus au nord, à proximité de la ville du soleil. Une théorie confirmerait même que depuis le temple du dieu soleil on pouvait voir l’ensemble des pyramides de la IVe dynastie, celui-ci devenant du même coup un repère inévitable depuis les sites funéraires royaux.

La Ve dynastie serait issue selon la légende de l’union de Rê et d’une des prêtresses du temple d’Onou. De fait les pharaons de la Ve dynastie édifièrent, en plus de leurs complexes funéraires de Abousir au nord de Saqqarah, des temples solaires dont l’élément principal était le Benben, obélisque massif édifié sur une plateforme.

Le plan général du grand temple de Rê serait à rapprocher de ceux des temples solaires des pharaons de cette dynastie retrouvés à Abou Ghorab et Abousir et dont ils se seraient inspirés. Une chaussée montante reliant deux temples dont le principal comportait un massif obélisque en maçonnerie qui domine une cour à ciel ouvert au centre de laquelle se trouvait un autel solaire formé d’un disque encadré de signes « hotep », destiné à recevoir des offrandes quotidiennes. Cette hypothèse n’a jamais été vérifiée sur le site de l’ancienne Onou.

C’est de la fin de cette époque également qu’apparaissent les premiers textes des pyramides qui connurent un grand développement dans les caveaux royaux de la VIe dynastie. Ces textes sacrés forment le premier corpus théologique dont nous ayons une trace aussi antique et sont certainement le fruit d’une longue étude et de patients travaux théologiques. Ils associent clairement la résurrection du roi avec la renaissance de l’astre solaire, liant encore davantage le personnage royal à son devenir divin y compris dans l’au-delà.